Michel Fustier
CONTES DE LA CREATION DU MONDE.
(http://contescreation.free.fr )
16 : LES GRECS : D’OURANOS A ZEUS.
Chez les grecs, c’est compliqué !
Evidemment, tout part du Chaos : c’est à dire de quelque chose qui
n’est pas quelque chose... En tout cas, vide, obscur, absent. Quelque
chose qui n’est rien. Ne vous y attardez pas trop longtemps.
Par quel mystère, on ne le sait trop, apparaît rapidement la terre. Et sur la
terre, qui est la Grande Mère de tout, s’est étendu le Père de tout, qui
est le ciel. Il s’appelle Ouranos. Ils font l’amour. Et, le
gourmand, il tient la terre enlacée de si près, qu’il ne laisse pas entre
eux l’espace qu’il faudrait pour qu’elle mette au monde les
enfants qu’il lui fait…
Ces enfants sont effectivement des êtres redoutables, des Cyclopes, des Titans,
des animaux monstrueux à la taille gigantesque… Mais leur père les
empêche de naître et ils sont enfermés dans la caverne obscure du ventre de
leur mère. En réalité, leur père en a peur, ils seraient trop puissants. Le
dernier d’entre eux, Cronos, a cependant, avec l’aide de sa mère
(qui commence à en avoir assez !), le culot de châtrer son père, le ciel, avec
une serpe affûtée…
Cela lui fait si mal, qu’il ne peut s’empêcher de faire un bond en
arrière et par là même de créer entre lui-même, le ciel, et sa femme, la terre,
un espace dans lequel se précipitent enfin tous ses redoutables enfants !
Maintenant donc, les Titans règnent sur le monde. Ce sont des êtres
terrifiants, éternels et infatigables. A leur tête Cronos,
évidemment…
Mais l’histoire va recommencer : Cronos a épousé Rhéa, fille de la terre,
et il se met à son tour à lui faire des enfants. Mais comme il a peur que ses
enfants ne lui prennent un jour sa place et ne le chassent de son trône, ils
les dévore dès leur naissance. Cette peur des enfants devait être dans les
gênes de la famille.
Quand le dernier d’entre eux, ZEUS, vient au jour, Rhéa réussit cependant
à tromper Cronos et, à la place de son fils, elle enveloppe une pierre de
langes et la lui fait avaler. Puis elle fait élever le petit Zeus dans une
grotte secrète. Quand Cronos s’aperçoit de la supercherie, il est trop
tard et il accepte même, s’étant encore une fois laissé duper par Rhéa,
de prendre un vomitif qui lui fait d’un seul coup régurgiter tous ses
autres enfants !
Cela fait maintenant beaucoup de dieux qui se trouvent en présence. Naturellement, ils se battent pour le pouvoir et c’est une terrible guerre : d’un côté, autour de Cronos, la plupart des Titans ; de l’autre, autour de Zeus, le reste des dieux, quelques Titans, et surtout les Cyclopes, qui sont capables, dans leurs ateliers souterrains, de fabriquer la foudre et qui donnent la victoire à Zeus.
Heureusement !
Heureusement, parce que la victoire de Zeus, c’est la victoire de l’ordre et de la justice. On respire. Zeus précipite les Titans révoltés au fond du Tartare, qui est une sorte d’enfer, et il en fait fermer l’entrée par des portes d’airain. Puis il organise le royaume des dieux, dont le siège… la capitale, dirions-nous, se trouve sur le mont Olympe, une haute montagne enneigée du fond de la Grèce. Ensuite il distribue équitablement à tous ses amis richesse et pouvoir.
Zeus est donc juste et bon. Cela ne l’empêche pas d’être
prudent. Il a épousé Miris, la rusée, qui est sur le point de lui donner un
fils. Pour éviter que ce fils ne conteste un jour son pouvoir (vous voyez que
c’est toujours la même histoire), il obtient que Miris, qui adore se
changer en toutes sortes de choses, se transforme en goutte d’eau. Et une
fois changée en goutte d’eau, il la boit : ce qui fait que c’est du
fond de lui-même que Miris, désormais prisonnière, donne naissance non pas à un
fils, mais à une fille, Athéna, qui vient au monde comme si elle sortait de la
tête même de Zeus.
Athéna est la déesse protectrice des Athéniens. La fille de Zeus, née de son
cerveau ! Vous voyez qu’ils ont des raisons d’être fiers.
Chez les dieux donc, la paix est établie. Ils ont bien encore quelques petits
problèmes avec Typhon, un vent tourbillonnant insupportable qui sème partout le
désordre… Mais rien ne peut être parfait !
Jusqu’à présent, les hommes sont plus ou moins mélangés aux dieux. La
seule grosse différence avec les dieux est qu’ils sont sujets à la
fatigue et ont besoin de se nourrir. Mais comme ils n’ont pas de femmes,
ils ne naissent ni ne meurent et sont heureux. C’est ce que l’on a
appelé l’Âge d’or.
Prométhée est, non pas un dieu, mais plutôt un de ces hommes, malins et
indisciplinés, auxquels les dieux font cependant appel lorsqu’ils ont un
problème délicat à régler. Et justement il faut aujourd’hui clairement
départager le rôle des dieux et celui des hommes. Prométhée immole un
bœuf et par ruse fait choisir par Zeus la peau et les os pour les dieux,
tandis que la viande échoit aux hommes. Ceux-ci ont en effet, comme dit plus
haut, besoin de se nourrir, à l’inverse des dieux.
Zeus cependant est furieux de s’être laissé duper et il confisque le feu
aux hommes, qui ne peuvent plus ainsi faire cuire leurs viandes. Prométhée
s’en va alors faire une promenade, apparemment nonchalante, dans
l’Olympe, où on avait l’habitude de le voir, et de nouveau par
ruse, il ramène sur terre le feu du ciel. Il est condamné à avoir le foie
perpétuellement dévoré par l’aigle de Zeus. Mais les hommes de nouveau
peuvent faire cuire leurs viandes.
Pour trancher définitivement le problème irritant des hommes, les dieux
décidèrent de créer pour les hommes des femmes sur le modèle de leurs propres
déesses. Comme cela, ils auraient à naître, et par conséquent à mourir, ne
serait-ce que pour empêcher la terre d’être surpeuplée.
Ils fabriquèrent donc une poupée de terre et d’osier, qu’ils
habillèrent magnifiquement et à laquelle ils donnèrent la vie. Ils
l’appelèrent Pandore et ils la donnèrent pour femme au frère de
Prométhée, Epiméthée, qui n’était pas très malin et ne se doutait pas que
les dieux lui faisaient un cadeau empoisonné. En effet, cette superbe Pandore,
et toutes les femmes qui furent ensuite faites sur son modèle, avaient
malheureusement en commun un immense appétit pour la bonne chère et les
plaisirs de toutes sortes. Et bien des hommes furent ainsi condamnés à un dur
labeur pour les satisfaire. Pauvre Epiméthée !
Mais surtout, victime de sa curiosité, Pandore, malgré les interdictions
répétées de son mari, ouvrit un coffre qui contenait tous les malheurs de la
terre et ceux-ci se répandirent partout : la maladie, la mort, la douleur, les
accidents, la faim… Les malheurs foisonnèrent de tous les côtés, de
génération en génération, sans que personne puisse les contenir, ni les parents
ni les enfants….
Voilà ce qu’il en coûte de vouloir être trop malins avec les dieux. Ils
vous rattrapent toujours au tournant. Et quelle belle explication au problème
du mal !
Sources : L’ensemble de la littérature grecque, où tous ces mythes sont
racontés, soit en entier, soit par petites allusions, avec des multitudes de
variantes, au gré de l’imagination des poètes. Nous nous sommes beaucoup
servi pour en faire la synthèse de L’univers, les dieux, les hommes de
J.P. Vernant. On voit que les Grecs ont donné une grande importance et
d’immenses développements à l’histoire des dieux ; l’homme ne
vient qu’en second. Curieusement, ils se montrent aussi pessimistes sur
le rôle de la femme que dans la tradition biblique… Les textes des deux
civilisations sont d’ailleurs contemporains.
(pour accéder aux comédies pour enfants de Michel Fustier: http://theatre.enfant.free.fr , aux comédies aiguës : http://comedes.aigues.free.fr , aux comédies pour l’entreprise : http://theatrentreprise.free.fr …))Michel Fustier, 4 rue de Chambfort, 69 100 Villeurbanne, 04 78 84 25 28.